L'expérience OuiShare - Retour sur le deuxième "sommet européen" à Rome

Une quarantaine de connecteurs de Ouishare se rassemblaient à Rome en novembre dernier pour construire le futur des prochains mois de OuiShare. Synthèse des résultats de ce weekend de travail.

A l’occasion du deuxième OuiShare Summit, à Rome, 40 connecteurs sont venus de toute l’Europe pour consolider le travail accompli depuis quelques mois et construire le futur de OuiShare. Voici quelques-uns des enseignements de cet intense week-end de travail et de partage. A la mi-novembre, moins d’un an après la naissance officielle de Ouishare (le premier anniversaire arrive bientôt... suivez notre actu !) et après une première édition très fructueuse à Paris, notre second “sommet européen” s'est tenu à Rome dans l’espace de coworking CoWo360. Une quarantaine de connecteurs se sont déplacés des quatre coins d’Europe pour 2 jours de workshops stimulants visant à esquisser ensemble le futur de OuiShare, travailler sur les projets en cours et à venir et échanger librement visions et expériences. Voici, en 5 idées-clés, un résumé - non exhaustif - de cette expérience collective.

Ouverture, accessibilité et transparence sont au coeur de nos valeurs

En ouverture de ce Summit, chaque participant était invité à proposer plusieurs mots-clés pour répondre à ces 3 questions :

  • Qu’aimez-vous le plus dans OuiShare ?
  • Qu’aimeriez-vous changer dans OuiShare ?
  • Quelles sont les valeurs qui doivent guider notre action ?

Un remue-méninges d'une bonne heure a suivi, qui nous a montré la diversité des cultures, des influences et des motivations des connecteurs. Sans surprise, "ouverture" et "transparence" se distinguent significativement comme les valeurs qui doivent guider nos actions. Par ouverture, nous entendons la lisibilité des processus ainsi qu’une culture de l’accessibilité, à la fois en interne et vers l’extérieur. Quant à la transparence, ou même "transparence radicale", comme il a été mentionné, elle est considérée comme un instrument pour rendre OuiShare inclusif : " Nous pouvons parler à tout le monde aussi longtemps que nous en parlons" Dans la même veine, ce brainstorming a fait ressortir les valeurs d’indépendance, de sincérité et de diversité. Parmi les autres mots-clés proposés, certains étaient plus centrés sur l'action : OuiShare devrait oeuvrer à renforcer le bien commun et, avant tout, privilégier l'impact (“just fucking do it” semble devenir l'une des devises de OuiShare, avec MPRL - voir ci-dessous). Pourquoi donc ? Cette orientation n'est pas seulement l’expression d'une certaine impatience ou d'un sage pragmatisme : "Concentrons-nous sur l'action et l'impact, parce que nous ne pouvons pas et nous ne voulons pas juger les motivations des gens. " Même si notre mission est encore à préciser - et restera probablement dans un état constant d'évolution - c'est une nouvelle étape. OuiShare commence à se positionner dans le paysage de l’économie collaborative comme un acteur neutre qui soutient en particulier les approches open-source.

Il n'existe pas de modèle unique pour les communautés locales de OuiShare

Rencontrer des gens dans la vraie vie (Meet People in Real Life - MPRL) a été, dès le début, l'une des seules règles de OuiShare. C'est ce qui fait la force de la communauté au niveau global (les “Summits” en sont un bon exemple !), mais également au niveau local. « Comment construire une communauté locale ? » était l’une des questions récurrentes de ce summit et a fait l’objet d'un atelier visant à mieux définir le rôle des connecteurs. De ces travaux, il ressort qu'il n'existe pas de “succes story” à dupliquer : chaque ville évolue dans un contexte très différent, selon sa taille, sa dynamique entrepreneuriale, ses lois, la persistance d’une tradition militante ou la présence d’étudiants. Certains des 15 groupes locaux couvrent des régions entières, simplement parce qu'il est plus logique de mutualiser les efforts dans les territoires dont l’identité est proche. Les besoins et aspirations des communautés peuvent fortement varier, de même que ceux du connecteur local, qui a souvent un emploi à temps plein, mais peut vouloir créer sa propre activité et chercher une viabilité économique soutenant son engagement dans OuiShare.

Le partage d'expériences avec les autres communautés locales est extrêmement précieux pour tous les connecteurs. Quelques règles de base (de la liste des “faux pas à éviter” jusqu’au kit de démarrage pour les nouveaux connecteurs) peuvent facilement être énoncées dans la mesure où la confiance et la délégation demeurent les principes de base. Pour résumer cette démarche, nous préférons dire que le projet OuiShare se distribue, plus qu'il ne se développe.

OuiShare, une expérimentation permanente

La culture de la flexibilité et celle du feedback (partager ses réactions, donner son avis) ont aussi été mises à l’honneur. Pour les connecteurs, il s’agit tout simplement de “permettre à OuiShare d’évoluer” et “d’avoir le droit à l'expérimentation”. Cela se traduit par la valorisation d’une critique constructive et la possibilité de mettre à l’essai des solutions.

Plusieurs ateliers ont également conclu sur la même idée : qu'il soit question de business models, d’outils d’organisation ou de nouvelles fonctionnalités pour le magazine en ligne, nous constatons souvent que la réponse à nos questions n’existe pas encore. Nous devons expérimenter et tester de nouvelles idées en continu; c’est ainsi que nous apprendrons et c’est peut-être le seul moyen pour nous de bâtir une forme de consensus. C’est le message adressé par les connecteurs à la communauté OuiShare dans son ensemble :

Nous ferons probablement des erreurs, c’est normal - dites nous juste quand cela arrive !

Comme toute aventure, OuiShare est une expérience et pourrait aussi être, en soi, un objet de recherche : comment la communauté croît-elle ? Comment construit et partage-t-elle les connaissances, comment interagit-elle avec les autres réseaux tout en restant une source d’inspiration et d’épanouissement pour ses membres ?

L’organisation OuiShare doit mûrir

Les questions de modèle économique étaient également au coeur de ce Summit, avec pas moins de quatre séances de travail sur les opportunités de développement de services et les autres possibilités de financement. Une douzaine de personnes donnant la moitié ou la totalité de leur temps à OuiShare sans recevoir aucune rétribution monétaire à l'heure actuelle, il est absolument nécessaire pour OuiShare de trouver un moyen de se financer de manière durable.

Tous les participants ont convenu que OuiShare devait explorer une grande variété d'options de financement (y compris l'auto-financement/crowdfunding par les membres de la communauté) pour rester aussi indépendant que possible. Ce modèle économique hybride inclurait le sponsoring des événements, les dons, les subventions et la prestation de services. Dans les prochains mois, OuiShare va essayer se rapprocher des fondations et des financeurs publics, dans la limite de ce qu’il sera possible d’envisager compte tenu du jeune âge de l’organisation. OuiShare commence déjà à saisir certaines opportunités de conseil, d’organisation d'événements ou d’ateliers ainsi que des projets de recherche. Ces activités doivent être renforcées et élargies. Plusieurs options vont être expérimentées, qui iront du développement d’une offre de service, à but non lucratif, au sein de la communauté OuiShare jusqu’à l’accompagnement des connecteurs dans la création de leur propre activité en freelance. Ces derniers reverseraient une part de leur chiffre d'affaires à la communauté. Nous devrons aussi nous inspirer de l'expérience d'autres organisations, telles que la P2P Foundation, Las Indias, l'Open Knowledge Foundation ou la Fondation Mozilla. S'organiser, c'est aussi mieux s’implanter dans son éco-système. Ainsi nous envisageons une plus large coopération avec les communautés de l'économie collaborative, comme MeshLabs ou Shareable. Les relations avec d'autres réseaux connexes ne seront pas négligées, en particulier dans le domaine de la recherche et de la science ouverte. Nous devrons d’abord identifier les acteurs importants dans ce domaine et étudier avec eux de quelle manière nous pourrions collaborer sur des projets de recherche.

L'année 2013 promet de belles surprises

Depuis le début de l'année 2012, la communauté OuiShare est principalement engagée dans deux types d'activités:

  • Connecter les personnes intéressées par l'économie collaborative et du partage, au travers de groupes en ligne et d'événements - plus de 40 organisés en moins d'un an - dans toute l'Europe.
  • Promouvoir et décrypter l'économie collaborative, via la magazine en ligne OuiShare.net qui a connu une forte croissance depuis son lancement en juin dernier, avec plus de 120 articles publiés en français, en anglais et en espagnol et plus de 20 000 visiteurs uniques par mois.

Cette dynamique va très probablement se poursuivre en 2013 compte tenu de l'importante couverture médiatique de OuiShare et de l'économie collaborative en général au cours des derniers mois en Europe et surtout en Espagne et en France. Beaucoup de nouveaux projets sont également nés pendant le Summit. L’atelier "Do-Tank" a produit à lui seul une série d'idées stimulantes, de la création d'une banque de temps au sein de la communauté au développement d'une application mobilité. Chacune de ces idées deviendra un projet si une équipe souhaite le mettre en place. Plusieurs temps forts sont déjà prévus pour l'année prochaine : nous espérons lancer une nouvelle version de la plateforme OuiShare.net dans les prochains mois; tester de nouveaux formats d'événements et accompagner des communautés OuiShare à se mettre en place en Amérique du Sud. Enfin et surtout, nous donnerons le coup d'envoi d'un festival très spécial au 1er semestre 2013. Restez en contact pour plus d'infos. Un grand merci à nos sponsors Lisa Gansky & Mesh Labs et Bedycasa, qui ont rendu cet événement possible ! Vous pouvez trouver l’ensemble du programme et toutes les enseignements du summit dans ce document. N’hésitez pas bien sûr à contribuer aux productions. La traduction de l'article a été réalisée par Edwin Mootoosamy, Louise Hain et Maxime Lathuilière. Credits Photos : Dimitri Tzortzis CC BY-SA / Stefano Borghi / Captures : Leila Pais de Miranda