Rencontre avec trois entrepreneurs qui préparent une société zéro carbone et zéro déchet

ZOOM. Eté 2015, les équipes de Ouishare et le collectif allemand OpenState se lancent dans une aventure inédite : réunir une centaine de designers, ingénieurs, et scientifiques pour prototyper une société zéro carbone et zéro déchet. Pendant 5 semaines, 12 technologies durables et open source ont été développées et une communauté internationale d’innovateurs s’est créée et développée. Les innovations proposées concernent la production d’énergie, la production alimentaire, la mobilité… 4 ans plus tard, nous avons eu envie de prendre des nouvelles : quel a été l’impact de POC21 pour les équipes qui y ont travaillé ? Où en sont-elles aujourd’hui ? Trois des douze porteurs de projets nous ont fait part de leurs avancées et perspectives.

Le camp d’innovation de la société post carbone s’est terminé il y a 4 ans. Avec le recul, quel a été l’apport de POC21 pour votre projet ?

Solar OSE est un concentrateur solaire qui récupère l’énergie du soleil sous forme de vapeur pour l’utiliser notamment dans les processus de transformation alimentaire : cuisson, pasteurisation, distillation. Il est aussi possible de lui ajouter un moteur pour faire de l'électricité. C’est une brique énergétique qui, contrairement au photovoltaïque, n’incorpore que des métaux simples : cuivre, acier, aluminium… Ce projet est développé au sein d’Open Source Ecologie.

Hugo pour Solar Ose. Au-delà d’avoir été un moment d’apprentissage intense pour toute l’équipe, POC21 nous a permis de gagner environ un an dans le développement du projet : en nous obligeant à libérer du temps pour le projet, en nous fournissant tous les outils nécessaires et en nous donnant accès à des financements. 

Faircap est un filtre à eau antibactérien open source qui donne accès à une eau potable à tous. Il peut être vissé à l'embouchure d'une bouteille, ce qui permet de boire une eau potable depuis n'importe quelle source : robinet, puit, rivière, torrent…

Mauricio pour Faircap.  Parce que la conception a été faite de manière collaborative avec le soutien de la communauté (conseils, mise en relation, compétences techniques), nous avons pu franchir les étapes facilement et en un temps réduit. En conditions “normales”, on estime que le développement de notre produit nous aurait coûté environ 80 000€.  Aussi, POC21 nous a permis d’optimiser l’usage de la subvention que nous avons reçue du Fonds d’Innovation Humanitaire. Au lieu d’un seul produit, nous avons fabriqué à la suite de POC21 une gamme de produits et accessoires : un filtre pour bouteille, un filtre familial avec une pompe qui élimine aussi les virus, une bouteille spéciale pour l'extérieur et le marché du voyage, une version du filtre pour bouteilles sportives, une version avec charbon actif pour l’eau courante.

MyFood est une serre automatisée qui combine permaculture et aquaponie. Elle vise à encourager les foyers à produire eux même leur alimentation, même sur de petites surfaces et avec un rendement optimisé. 

Mickael pour MyFood. Pour nous ce qui a beaucoup compté, c’est la visibilité que nous a donnée le camp d’innovation : à travers les médias d’une part et grâce aux visites du public d’autre part. La rencontre avec le grand public nous a permis de valider la pertinence du concept et nous a encouragé à nous lancer à plein temps sur le projet à la fin de l’événement. 

Que s’est-il passé après ? Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Hugo pour Solar Ose. Nous avons validé le bon fonctionnement de Solar Ose en 2016 avec le kilowatt, le suivi automatique du soleil et la température maximale annoncés dans la foulée de POC21. Depuis, nous nous sommes lancés dans une version à usage professionnel : celle-ci est quatre fois plus puissante et mesure 10m de long. On est à la limite de la taille industrielle, disons qu’elle est adaptée à la taille d’un éco-village qui souhaiterait être autonome en énergie pour ses activités artisanales. La conception informatique est aujourd’hui presque terminée, aussi on souhaite passer à la fabrication en 2020.

Mauricio pour Faircap. Depuis POC21, de nombreuses collaborations nous ont permis de développer de nouveaux type de filtres ainsi que de nouveaux produits. Pour développer de nouveaux filtres, nous devons impérativement faire des tests de dépistage. Ceux-ci nécessitent normalement du matériel coûteux, un laboratoire, des fournitures et du personnel expérimenté. Pour dépasser cette contrainte, nous avons rendu le processus de test ouvert et distribué : nous avons créé un kit de test que nous envoyons aux chercheurs ou ONGs souhaitant les tester sur leur problématique de filtrage. Nous avons créé de nombreux partenariats avec des université et des ONGs (Université de Barcelone, agence R0g de Berlin, etc.) L’autre axe de développement, ce sont les nouveaux produits. Par exemple, nous envisageons de créer un bouchon pour les bouteilles en verre de Soulbottles un filtre qui filtrerait l’eau du robinet. Aujourd’hui, près de la moitié des personnes qui ont accès à l’eau au robinet ne la boive pas car elle est trouble, ou car elle a un mauvais goût. Avec un projet comme celui-ci, nous pourrions contribuer à la réduction de l’achat de bouteilles en plastique. De plus, cela viendrait soutenir notre modèle économique et notre mission sociale : pour chaque filtre acheté en Europe, nous pourrions offrir un filtre familial à une ONG. 

Mickaël pour Myfood. Nous avons créé la société sur fonds propres dans les mois qui ont suivi POC21 et nous avons installé les 50 premières serres en un an et demi. Nous avons ensuite lancé notre première levée de fonds pour continuer de développer le projet et financer l’équipe. A ce jour, nous avons installé 200 serres connectées et nous sommes 10 à travailler sur MyFood. Pour poursuivre l’aventure et ouvrir la gouvernance, nous lançons une nouvelle campagne de financement par le crowd-equity et proposons à des particuliers de devenir actionnaires de Lita. 

De quoi avez vous besoin pour aller plus loin ? Comment est-ce que les personnes qui lisent cet article pourraient contribuer à vos projets respectifs ?

Hugo. L’association est ouverte et nous aurions plaisir à intégrer de nouvelles recrues qui se reconnaissent dans le projet : les compétences techniques sont bienvenues mais pas que… Nous aimerions relancer le volet think-tank et événementiel auquel nous avons aujourd’hui peu de temps à consacrer.  

Mauricio. Nous croyons au pouvoir des collaborations et nous sommes donc ouverts à de nouvelles opportunités pour atteindre le marché (co-marquage, distribution, communications, reportages, marketing, etc.) comme avec Soulbottles à Berlin. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des idées ! De plus, nous avons été sélectionné par le MIT dans le cadre du programme Solve, et vous pouvez voter pour Faircap et découvrir les autres projets ici !

Mickaël. Notre enjeu actuel consiste à nous faire connaître à un plus large public. Nos serres automatisées sont une réponse pertinente à la nécessité de décentraliser la production alimentaire, notamment pour réduire la production de carbone du secteur alimentaire. Aujourd’hui, nous sommes peu présentés sous cet angle là, c’est une chose sur laquelle on souhaite travailler, notamment avec le soutien des médias.



Pour les contacter :

Hugo & Solar Ose - info@opensourceecologie.org

Mauricio & Faircap -  info@faircap.org 

Mickael & MyFood - contact@myfood.eu